LE CANADA ET LA GUERRE DE CORÉE 3 partie
EN PATROUILLE À CHORWON
Vers la mi-juin, la 8e Armée américaine avait élargi sa percée sur la côte est et s'était avancée environ 16 kilomètres en direction du centre de la péninsule. Cette ligne devait demeurer substantiellement la même jusqu'à la fin de la guerre.
La brigade canadienne se vit assigner un front long de 6 900 mètres s'étendant au sud-ouest de Chorwon. La plaine de Chorwon se prolongeait au nord-est; devant le front, il y avait un réseau de collines et de vallées étroites. C'est là, au cours des semaines qui suivirent, que les troupes furent affectées à des raids et à des patrouilles. La position canadienne était vulnérable car les vallées et les ravins offraient un accès facile aux infiltrations ennemies et les troupes devaient être constamment sur un pied d'alerte.
La première de la série des grandes patrouilles sur le front de la brigade fut exécutée le 21 juin. La patrouille se composait de fantassins du RCR et de chars du Lord Strathcona's Horse, appuyée par l'artillerie de campagne de la RCHA et d'un élément de contrôle aérien tactique. Une base sûre fut établie près de Chung-masan où l'artillerie se déploya tandis que le reste de la patrouille poursuivit plus avant. Lorsqu'un avion de reconnaissance aérienne signala la présence de l'ennemi en force sur une colline voisine, la patrouille ordonna une attaque aérienne sur la position et se retira dans la zone de la brigade. Les patrouilles subséquentes suivirent en somme le même mode d'opération et obtinrent à peu près les mêmes résultats.
LE DÉBUT DES POURPARLERS DE TRÊVE ET LA FORMATION DE LA 1RE DIVISION DU COMMONWEALTH
Au cours de l'été 1951, deux événements importants eurent lieu. Au début de juillet, à la demande des communistes, on entreprit des négociations pour un cessez-le-feu. Des difficultés surgirent dès le début des pourparlers de trêve. On soupçonnait les communistes d'avoir entrepris ces pourparlers non pour obtenir la paix mais plutôt pour en tirer des avantages militaires. Comme la guerre elle-même, les pourparlers trainèrent en longueur pendant les deux années suivantes.
Également en juillet, on annonça que la 25eBrigade canadienne rejoindrait la 1re Division du Commonwealth nouvellement formée et confiée au commandement du major-général J.H. Cassells. Dès sa formation, la division, sous le contrôle opérationnel du 1erCorps d'armée américain, détenait un secteur de la ligne Kansas s'étendant en direction ouest sur 10 000 mètres à partir du point de rencontre de l’Imjin et de la Hantan. Les positions ennemies principales s'échelonnaient sur 5 000 à 7 500 mètres au nord de l’Imjin.
Comme nous l'avons déjà mentionné, l'activité ennemie dans ce secteur menaçait la voie d'approvisionnement vers Chorwon. Par conséquent, au cours des mois suivants, on vit la 1re Division du Commonwealth s'occuper activement de patrouiller en profondeur la pointe avant qu'elle n'occupe enfin ce secteur lors des opérations Minden et Commando.
Du 28 juin au début de septembre 1951, alors que la 25eBrigade fut tenue en réserve, on lui confia un certain nombre de missions. À la mi-août, le RCR effectua une patrouille de bataillon. Plus tard au cours du mois, le PPCLI et le Royal 22e Régiment rencontra une certaine résistance pendant qu'ils consolidaient leurs positions et patrouillaient jusqu'aux cotes 187 et 208.
LE FRANCHISSEMENT DE L’IMJIN
Comme les négociations de paix demeuraient au point mort, le commandement des Nations Unies accéléra son offensive sur le front du 1er Corps d'armée. Au cours des mois de septembre et d'octobre, deux opérations dont les noms codés étaient respectivement Minden et Commando, furent exécutées afin d'assurer la défense en profondeur de ce secteur et de fournir une meilleure protection latérale à la voie d'approvisionnement Séoul-Chorwon. Au cours de la première de ces opérations, Minden, la ligne Wyoming fut prolongée de manière à supprimer la saillie créée par le méandre dans la rivière Imjin.
Le jour J de l'opération Minden fut le 8 septembre 1951. La Brigade du Commonwealth établit une tête de pont solide dans le no-man's-land, sur la rive nord du cours inférieur d’l'Imjin. C'est de cette base, que, trois jours plus tard, les deux autres brigades devaient se diriger vers l'objectif : une ligne reliant Sanggorang à Chung-gol, portant le nom codé Wyoming. Pendant ce temps, les sapeurs avaient construit ou réouvert les routes sillonnant ce secteur et construit deux ponts, Pintail et Teal, enjambant la rivière Imjin. Ces ponts étaient des liens vitaux aux secteurs de ravitaillement situés au-delà de l'Imjin et, dans les mois à venir, joueraient un rôle important dans les activités des Canadiens.
Le 11 septembre, la division composée de la 29eBrigade sur la gauche et de la 25e Brigade sur la droite, quitta la tête de pont pour se diriger vers le nord. Les Sud-Coréens et les Américains avançaient sur les deux flancs. Le 13 septembre, sans grande opposition et avec peu de pertes, l'opération prenait fin.
De la mi-septembre jusqu'à la date de l'opérationCommando qui débuta le 3 octobre, la 25e Brigade s'occupa principalement d'asseoir ses positions et d'exécuter des patrouilles de routine. Ces patrouilles, il faut le souligner, étaient dangereuses et constituaient souvent pour ceux qui y prenaient part une activité qui était loin d'être routinière.
L'opération Commando, qui réunissait les quatre divisions du 1er Corps d'armée américain, permit d'établir une nouvelle ligne de front, appeléeJamestown. La partie de la ligne défendue par les forces du Commonwealth était située sur un terrain élevé d'un affluent de la rivière Sami-chon. Les divisions américaines se trouvaient sur la droite et la 1re Division de la République de Corée était située sur la gauche. Les brigades de la Division du Commonwealth lancèrent leurs attaques pendant plusieurs jours de suite, car chacune pouvait alors compter sur un appui plus massif de l'artillerie. Les Canadiens, auxquels on avait rattaché les 1st Royal Ulster Rifles de la 29e Brigade britannique, s'ébranlèrent le lendemain du jour J. L'objectif principal du RCR était la cote 187, tandis que les objectifs du PPCLI comprenaient une deuxième côte, portant aussi le numéro 187, et la cote 159. Les Ulsters devaient prendre la zone sise entre les villages de Yongdong et Chommal.
Les Ulsters lancèrent l'attaque et sans grande difficulté atteignirent tous leurs objectifs cet après-midi-là. Vers la fin de l'après-midi du jour suivant, soit le 5 octobre, le RCR et le PPCLI signalaient que leurs missions étaient accomplies avec succès. La 28e Brigade du Commonwealth, qui avait entre-temps essuyé une plus forte opposition, réussissait à emporter son objectif, la cote 217, le 8 octobre.
La division installa alors la ligne Jamestown entre les rivières Sami-chon et Imjin, avec les lignes Wyoming et Kansas à l'arrière. Elle devait maintenir un front d'environ 19 000 mètres avec sept bataillons sur la ligne d'attaque. Dans la zone géographique située devant elle, la ligne principale ennemie se trouvait beaucoup plus proche qu'auparavant et les collines nouvellement conquises étaient plus exposées aux attaques.
Ces opérations avaient également servi à fondre la 1re Division du Commonwealth, composée de groupes de diverses nationalités, en une force d'attaque imbattable. Un sens de la cohésion et un esprit de corps s'étaient développés qui seraient d'une valeur inestimable au cours des longs mois à venir.
LE PREMIER ROULEMENT OCTOBRE À NOVEMBRE 1951
Au cours des mois d'octobre et de novembre 1951, les troupes canadiennes firent l'objet de leur premier roulement. Le 1er bataillon du PPCLI, commandé par le lieutenant-colonel N.G. Wilson-Smith, remplaça graduellement le 2e bataillon du PPCLI afin de permettre l'initiation des hommes de troupes inexpérimentés.
Une compagnie du 1er bataillon du PPCLI se retrouva dans le feu de l'action presque deux semaines avant l'entrée officielle de l'unité sur le front, au cours de l'opération Pepperpot, rôle attribué aux Canadiens dans plusieurs raids menés par la 1re Division du Commonwealth contre certaines positions ennemies connues. On visait à infliger des dommages et des pertes à l'ennemi et par la même occasion, obtenir des renseignements sur la disposition de ses troupes. Pour ces opérations qui débutèrent le 23 octobre la brigade canadienne fournit une compagnie de chaque bataillon. La côte 166, principal objectif des Canadiens, fut confiée à la compagnie du Royal 22e Régiment, tandis que d'autres objectifs, la côte 156 et un autre mamelon sans nom entre les deux, furent attribués à la compagnie (A) du 1erbataillon du PPCLI et au RCR respectivement. Le Royal Canadian Regiment et le PPCLI atteignirent leurs objectifs devant une opposition assez faible, mais le Royal 22e fut empêché d'atteindre le sien par le tir nourri de mitrailleuses. L'opération coûta la vie à cinq Canadiens et fit 21 blessés tandis qu'on rapporta 37 morts connus chez l'ennemi et autant de présumés tués ou blessés.
LES ATTAQUES-ENEMIES NOVEMBRE 1951
Entre-temps, l'ennemi adopta lui aussi des mesures offensives. À compter de la mi-octobre, en riposte à l'opération Commando, les Chinois organisèrent une série d'attaques qui se poursuivirent avec de plus en plus d'intensité jusqu'en novembre.
Dans la nuit du 2 au 3 novembre, l'ennemi attaqua le centre de la ligne canadienne maintenue par les compagnies (A) et (C) du Royal Canadian Regiment. Les premières attaques furent repoussées, mais, au cours d'une attaque à l'aube, le peloton d'avant, à court de munitions et affaibli par les pertes, fut forcé de se replier, ce qu'il fit en livrant un combat d'arrière-garde efficace. L'ennemi continua de harceler la compagnie, mais sous le feu nourri de l'artillerie et des mortiers, il finit par se retirer.
Le 4 novembre, la 28e Brigade du Commonwealth britannique affronta des bombardements forts violents suivis d'attaques en force. Après un combat acharné, la côte 217 tomba aux mains des Chinois, dans la soirée, et la côte 317 de même, pendant la nuit. Pendant que les combats se poursuivaient sur le front de la 28e Brigade, l'ennemi lança une série d'attaques contre une compagnie du 1erbataillon du PPCLI. La première attaque fut brisée par l'artillerie et les mortiers; la deuxième et la troisième furent repoussées tant par le feu des armes de soutien que par celui des propres armes de la compagnie. Après avoir essuyé son troisième échec, l'ennemi se retira.
Le combat suivant auquel participèrent les troupes canadiennes fut un autre raid contre la côte 166, le 9 novembre, par la compagnie (C) du Royal 22e Régiment. Au cours de ce raid, deux pelotons atteignirent leurs objectifs intermédiaires et le peloton d'avant-droit atteignit un point à moins de 90 mètres du sommet de la colline. Alors que l'ennemi mit en branle une forte contre-attaque, le groupe tout entier, ayant accompli l'essentiel de sa mission, fut retiré.
Un rajustement des secteurs divisionnaires, effectué à ce stade, rétrécit la largeur du front du Commonwealth d'environ 4 600 mètres. La côte 355 qui dominait le centre de la ligne d'attaque passa aux mains de la 3e Division américaine. La brigade canadienne fut chargée d'un front de presque sept kilomètres s'étendant vers le nord-est à partir de la rivière Sami-chon.
Les Canadiens, avec leurs trois bataillons en ligne, terminèrent l'occupation de leur nouveau secteur le matin du 22 novembre. L'après-midi de ce même jour, l'ennemi entreprit le bombardement intensif de la côte 355, aux mains des Américains, qu'il fit porter jusqu'au secteur étenu par le Royal 22e Régiment, plus particulièrement la compagnie (D). Les obus continuèrent à pleuvoir pendant toute la nuit. La pluie se changea en neige et le terrain se transforma en boue, ce qui rendait extrêmement difficile le travail des sapeurs pour maintenir ouvertes les voies d'accès aux compagnies assaillies.
Le lendemain, l'ennemi accéléra le tir d'obus. Il lança, par la suite, en fin d'après-midi, une attaque contre les deux positions. La compagnie canadienne conserva le terrain gagné, mais au début de la soirée, la majeure partie de la côte 355, qui avait essuyé le plus fort de l'attaque, tomba aux mains de l'ennemi. Entre-temps, les Chinois avaient également repris la côte 227.
La perte permanente de la côte 355 aurait constitué une grave menace à la force des Nations Unies en permettant à l'ennemi de contrôler la voie latérale qui traversait le secteur américain et aurait rendu les positions canadiennes intenables. Déjà la présence de l'ennemi sur les côtes 227 et 355 présentait un danger d'encerclement pour le Royal 22e Régiment. Au cours des nuits du 23 au 24 et du 24 au 25 novembre, le lancement d'obus et les attaques se poursuivirent avec une intensité accrue sur les deux fronts, et la côte 355 passa des mains des Chinois à celles des Américains, puis à celles des Chinois et enfin à celles des Américains. Chaque fois que l'ennemi reprenait le contrôle, le Royal 22e Régiment était menacé d'autres attaques. Dans la soirée du 25 novembre, après quatre jours et quatre nuits de bombardements continuels d'obus, la côte 355 était à nouveau aux mains des Américains et la compagnie (D) du Royal 22e Régiment, malgré un état d'épuisement presque total, conservait toujours le terrain conquis.
Avec la reprise des négociations d'un cessez-le-feu, des ordres furent émis, le 27 novembre, interdisant la sortie de toute autre patrouille de combat et restreignant le tir de l'artillerie à la défense et au contre-bombardement.
LES OPÉRATIONS DE DÉCEMBRE 1951 À AVRIL 1952
Le cessez-le-feu partiel se révéla bientôt unilatéral et temporaire puisque l'ennemi continuait de bombarder et d'envoyer des patrouilles. L'artillerie du Commonwealth fut bientôt autorisée à reprendre ses activités normales et les restrictions imposées à l'infanterie furent graduellement levées. Le programme de la brigade comportait une patrouille de combat pour chaque unité de même que des patrouilles de reconnaissance nocturne et d'embuscade. Il visait à obtenir des renseignements sur les positions ennemies en vue de raids éventuels et à capturer des prisonniers. Dans la nuit du 10 décembre 1951, une compagnie du PPCLI exécuta un raid derrière la côte 277 et le RCR envoya une patrouille de combat de 35 hommes attaquer la côte 166. Les deux patrouilles atteignirent leurs objectifs et réussirent à obtenir des renseignements utiles concernant les défenses ennemies.
À la mi-janvier 1952, la 25e Brigade assuma le rôle de réserve divisionnaire après quatre mois et demi au front. En réserve pendant les sept prochaines semaines, les Canadiens furent occupés principalement à asseoir les positions de défense des lignes Wyoming et Kansas.
Les 9 et 10 mars, la 25e Brigade revint sur le front dans des positions de long de la rivière Sami-chon avec deux bataillons (le RCR et le PPCLI) à l'ouest de la vallée et un bataillon (le Royal 22e Régiment) à l'est. La venue du printemps fut témoin d'une activité accrue chez l'ennemi. Dans la nuit du 25 mars, les Chinois lancèrent un raid en force et bien coordonné contre la côte 132. L'attaque porta sur un peloton du 1er bataillon du PPCLI qui occupait la côte. Encerclés, les Patricias conservèrent leur position jusqu'à ce que les Chinois finalement se retirent quelque deux heures et demie plus tard.
EN PATROUILLE DE MAI À JUIN 1952
Durant les mois de mai et de juin 1952, les unités de la Division du Commonwealth devaient organiser de fortes patrouilles. Une politique arrêtée par le quartier général du 1er Corps d'armée exigeait que chaque bataillon d'avant effectue une forte patrouille de combat à chaque semaine contre des positions ennemies connues. Celles-ci devaient ramener au moins un prisonnier tous les trois jours. Cette politique, qui se révéla difficile et coûteuse, fut par la suite abandonnée.
Bien que les détails des activités de ces patrouilles soient trop nombreux pour être racontés ici, il y avait certaines similitudes dans les tactiques et les contacts. L'effectif du raid variait depuis une patrouille de 20 hommes jusqu'à une compagnie complète, et le feu nourri d'appui était assuré par l'artillerie et les chars d'assaut. Dans le secteur canadien, les patrouilles devaient d'abord traverser leur propre champ de mines et de barbelés et franchir ensuite la vallée pour atteindre les collines d'en face. Après avoir établi une base sûre de défense et de contrôle de l'artillerie, aussi près de l'objectif que possible, le groupe principal se dirigeait vers l'objectif détenu par l'ennemi où il devenait souvent la cible des mortiers et des armes portatives ennemis. Les objectifs eux-mêmes se caractérisaient par un réseau de tranchées souvent reliées par des tunnels dans lesquels l'ennemi pouvait facilement se déplacer. Dans ce réseau, il était possible d'infliger des pertes, mais la patrouille elle-même était exposée aux attaques et trouvait qu'il était extrêmement difficile de faire des prisonniers.
Une patrouille de ce genre fut exécutée par le 1er bataillon du PPCLI dans la nuit du 20 au 21 mai. Un groupe de 33 hommes fut réparti en une base sûre, une section de feu de couverture et une section de combat, alors que le tir de souien fut assuré par une troupe du Lord Strathcona's Horse, une troupe du 1er régiment de la RCHA et les pelotons de mitrailleuses et de mortiers de l'unité. La base sûre fut établie au creux de la vallée de la Nabu-ri à 23 heures, le gros du détachement y passant à minuit. La section de tir de couverture prit ensuite position au pied de la colline, sous les tranchées ennemies. La section de combat poursuivit l'escalade de la pente. L'ennemi ouvrit le feu. On ordonna la retraite, le groupe de patrouille étant surpassé en nombre. Il y eut un mort et quatre blessés. Les pertes ennemies furent évaluées à sept morts ou blessés. Il n'y eut aucun prisonnier.
En plus des patrouilles de combat, dirigées contre le territoire ennemi, les Canadiens exécutèrent également un certain nombre d'autres genres de patrouilles. Des patrouilles d'embuscade, des patrouilles stationnaires, des patrouilles de reconnaissance furent exécutées en grand nombre afin de capturer des prisonniers, de déceler les mouvements ennemis et de fournir des renseignements au sujet de l'emplacement des armes ennemies.
À la fin de mai 1952, la 1re Division du Commonwealth reçut l'ordre d'affecter deux compagnies de fantassins, une britannique et l'autre canadienne, à la garde des prisonniers de guerre sur l'île Koje. Une unité canadienne du RCR fut chargée de ce travail sur l'île Koje jusqu'au 10 juin.
À la fin de juin, la 25e Brigade passa dans la réserve divisionnaire. En plus des activités normales de réserve, elle travailla aux ouvrages de défense des lignes Kansas et Wyoming et reçut une instruction de perfectionnement; elle prit également part à une opération nommée Arche de Noé. La mousson de juillet et la crue consécutive de la rivière Imjin menaçaient d'effondrement les ponts Teal et Pintail. En dépit des efforts, le pont Teal ut emporté. Cependant, vers la mi-septembre, lorsque la crue diminua, le pont Pintail tenait toujours et le pont Teal était en voie de restauration.
Entre-temps, les Canadiens étaient retournés au front le 10 août. Ce retour fut marqué par un changement important dans la situation générale. Au cours de l'été 1952, l'ennemi était devenu graduellement plus agressif. Il avait occupé une partie du no-man's-land, envoyé des patrouilles, lancé des raids sur les positions avant, et augmenté le volume du bombardement des positions avant. Cette activité accrue devait atteindre des proportions gigantesques en octobre et novembre.
Le front établi par la brigade s'étendait entre ce qui avait été les villages de Paujol-gol et Kojanharisaemal dont la gauche était assurée par le Royal 22e, la droite par le PPCLI et le centre par le RCR sur la côte 355. Au cours des trois mois qui suivirent, la 25eBrigade allait essuyer des tirs de mortiers et d'obus beaucoup plus nourris qu'en toute autre période sur le front. Des pluies torrentielles virent faire taire l'artillerie ennemie, mais l'eau entraîna l'effondrement des casemates ou les rendit inutilisables. Lorsque les pluies cessèrent, les bombardements reprirent. Occupés à améliorer leurs défenses, les Canadiens ne patrouillèrent pas en grand nombre jusqu'à la fin du mois d'août lorsque des patrouilles de combat du PPCLI et du RCR franchirent la vallée.
Au cours de la première partie d'octobre, le front américain à l'est fut l'objet de combats soutenus mais la Division du Commonwealth demeura relativement intouchée. Cette situation ne devait pas durer. Les bombardements ennemis s'accrurent et les ripostes aux patrouilles s'intensifièrent. Un raid contre la cote 227, mené par la compagnie (B) du RCR les 12 et 13 octobre, tomba dans une embuscade à proximité de son objectif. Trois nuits plus tard, une patrouille de 25 hommes du PPCLI tomba sur un peloton chinois dans le secteur de la côte 217; elle y perdit 10 hommes, deux morts et huit blessés. L'accroissement de l'activité ennemie, surtout dans les environs des côtes 227 et 217, laissait prévoir que les Chinois se préparaient à quelqu chose dans ce secteur du front. Leurs intentions devinrent manifestes une semaine plus tard.
L’ATTAQUE DE LA CÔTE 355
La côte 355, connue sous le nom de Petit Gibraltar, avait été le théâtre de combats acharnés depuis que le secteur avait d'abord été occupé au cours de l'opération Commando en octobre 1951. L'activité canadienne la plus remarquable avait été la défense des positions dans le col de la cote 227 par le 2e bataillon du Royal 22e Régiment du 22 au 25 novembre. Depuis le début de septembre 1952, le Royal Canadian Regiment gardait la cote. Cinq secteurs de compagnie se trouvaient à l'intérieur de ses limites.
L'ennemi prépara l'attaque par un bombardement nourri pendant les trois premiers jours d'octobre, surtout contre la zone II qui se trouvait immédiatement à l'est du col, entre les côtes 355 et 227. Du 17 au 22 octobre, les bombardements reprirent. Ainsi, lorsque la compagnie (B) occupa le secteur, le 22 octobre, elle trouva les fortifications en très mauvais état, les lignes téléphoniques coupées et les tranchées effondrées. Les tirs d'obus ennemis rendaient impossible l'amélioration des fortifications et des lignes de communications.
Peu après 18 heures le 23 octobre, l'ennemi fit pleuvoir une autre concentration de feu d'artillerie très intense avant de passer à l'attaque. Sous la violence de l'assaut et sans communication, la compagnie (B) se retira dans le secteur de la compagnie (A). Le commandant du bataillon ordonna alors un tir de mortiers et de canons de chars d'assaut sur les secteurs tombés aux mains de l'ennemi ainsi que contre la côte 227, la zone à l'ouest de la côte 355 et la vallée au nord. Il ordonna ensuite une contre-attaque. La contre-attaque par la compagnie (D) se poursuivit vers minuit. Le peloton de gauche rencontra une forte résistance et subit des pertes, mais réussit à reprendre la position.
Le front de la division demeura relativement calme pendant les quelques jours qui suivirent, avant que la brigade ne termine son service. Ainsi prenait fin, pour la brigade, l'une des périodes les plus difficiles de la guerre et certainement la plus coûteuse : en moins de trois mois, le RCR avait subi 191 pertes, lePPCLI, 18, et le Royal 22e Régiment, 74.
LE DEUXIÈME ROULEMENT D’AUTOMNE NOVEMBRE 1952
Le 3 novembre 1952, le 3e bataillon du PPCLI remplaça le 1er bataillon dans l'ordre de bataille et entreprit la dernière étape de son entraînement avant de partir pour le front. Il était également chargé des contre-attaques afin de reprendre les positions que l'ennemi avait prises du Black Watch de la 29eBrigade britannique. Comme c'était à prévoir, la répétition de la contre-attaque se muta en action réelle sur un terrain appelé le Crochet. Ce terrain accidenté allait devenir le lieu de bien des pertes aux unités du Commonwealth dans les mois à venir.
En provenance de l'ouest, un affluent sans nom de la rivière Sami-chon séparait les forces belligérantes dans la région du Crochet. Le versant sud de la vallée de cet affluent était dominé par une crête qui s'étendait du nord-ouest au sud-est. La cote 146 formait l'extrémité est de cette ligne de faîte. Le Crochet marquait la limite ouest de la chaîne de collines. Du Crochet on pouvait surveiller la vallée du cours inférieur de la Sami-chon; par conséquent, la vallée était l'objet de fréquentes attaques ennemies.
Le Black Watch défendait la ligne de la cote, la nuit du 18 novembre, lorsque l'ennemi attaqua avec des effectifs équivalents à ceux d'un bataillon, et réussit à prendre pied sur le Crochet. Au moment où la compagnie du Black Watch, postée sur la cote 146, contre-attaqua, le 3e Bataillon du PPCLI assisté d'une troupe de chars du Lord Strathcona's Horse s'avança pour prêter main forte à l'unité et la relever à la défense de la cote 146. À l'aube, le Black Watch avait nettoyé la position principale et le PPCLI occupait le terrain sans difficulté. Le PPCLI demeura sur le Crochet pendant plusieurs jours avant de rejoindre le bataillon à l'entraînement en vue du retour de la brigade au front.
À la fin de novembre, la 1re Division du Commonwealth entreprit un nouveau déploiement général de ses troupes. Au lieu d'avoir deux brigades au front avec trois bataillons à l'avant, les trois brigades se trouvaient sur la ligne de front avec chacune seulement deux bataillons à l'avant. Ainsi, chaque commandant de brigade contrôlait un front plus étroit et disposait de bataillons de réserve pour contre-attaquer et effectuer la relève.
Lorsque les Canadiens revinrent au front, ils s'installèrent sur la gauche du front de la division; le brigadier Bogert plaça le Royal 22e sur la hauteur de Yongdong, à l'est de la rivière Sami-chon, et le PPCLI sur le Crochet. Le RCR fut de réserve, à l'exception d'une compagnie rattachée au PPCLI.
Les deux mois qui suivirent devaient être relativement tranquilles. La principale activité portait sur l'amélioration des ouvrages de défense, notamment ceux du Crochet. L'importance de tunnels et de tranchées efficaces avait été démontrée lors des attaques d'octobre contre la cote 355, lorsque l'artillerie chinoise avait tellement détruit les défenses que toute résistance était impossible. Par contre, au cours des attaques des 18 et 19 novembre contre le Crochet, lorsque les postes défensifs à découvert avaient été rasés, les défenseurs du Black Watch pouvaient trouver asile dans les tunnels existants et demander à l'artillerie d'ouvrir le feu sur l'ennemi. Ils avaient ainsi empêché que la position ne tombe aux mains de l'infanterie d'assaut. Au cours de cette période au front, les tranchées furent approfondies et prolongées, les postes de commandement, les postes d'observation et les casemates furent fortifiés, et l'on construisit toutes sortes d'autres terrassements. Le programme de tunnels fut exécuté par le gros des hommes du 23eEscadron de campagne du Génie royal canadien, aidé de trois compagnies d'ouvriers sud-coréens. Le travail était à la fois difficile et dangereux. Se frayant un chemin dans le roc solide et le sol gelé, les sapeurs avaient prolongé de 112 mètres les tunnels existants à la fin janvier.
Pendant ce temps, les attaques ennemies et les patrouilles actives se poursuivaient, mais ni les unes ni les autres n'avaient la même importance qu'auparavant. Les Canadiens ne prirent part à aucun raid de compagnie pendant cette période, mais les patrouilles stationnaires et les patrouilles de reconnaissance, d'embuscade et d'attaque, accompagnées de fréquentes alertes sous la menace d'attaques ennemies, obligeaient les troupes à demeurer vigilantes. Cependant, sur la droite du front de la division, la 28e Brigade n'eut pas autant de chance. Plusieurs rencontres violentes dans le secteur des cotes 355 et 227 se soldèrent par des pertes plutôt lourdes.
À la fin de décembre, le PPCLI et le RCRavaient changé de position. Le Royal 22e Régiment demeura sur le mamelon Yongdong jusqu'au 30 janvier. Le mois passé au Crochet par le RCR fut aussi calme. Bien que l'unité se soit adonnée à des patrouilles actives, elle ne rencontra que rarement l'ennemi et ces rencontres ne lui infligèrent aucune perte importante.
Le 30 janvier 1953, toute la 1re Division du Commonwealth (à l'exception de l'artillerie) passa en réserve pour la première fois depuis sa formation en juillet 1951. L'artillerie divisionnaire demeura au front afin d'apporter son appui aux unités américaines qui prirent la relève.
La Division du Commonwealth demeura en réserve jusqu'au 8 avril, période durant laquelle elle effectua des exercices d'entraînement au niveau des bataillons, des brigades et de la division. Deux événements importants allaient se produire au cours de cette période. Le premier fut l'ajout de soldats sud-coréens à la Division du Commonwealth. L'autre fut le début du deuxième roulement important des unités canadiennes en Corée.
LE PERSONNEL CORÉEN DANS LES FORCES CANADIENNES KATCOMS
Peu avant d'être rappelée sur la ligne de front, au printemps de 1953, la Division du Commonwealth fut renforcée par 1 000 soldats coréens appelés en anglais (Katcoms), abréviation signifiant l'apport coréen au Commonwealth (Korean Augmentation to Commonwealth). Les Sud-Coréens avaient servi au sein des forces du Commonwealth depuis le tout début de la guerre comme porteurs, pourvoyeurs et interprètes, rôles de nature non combattante. Un Corps de service coréen avait été formé à cette intention et un régiment avait été rattaché à la 1re Division du Commonwealth. Pendant ce temps, le commandement des Nations Unies avait entrepris l'entraînement des nationaux coréens comme renforts d'infanterie. Ces hommes de troupe qui avaient reçu l'entraînement de base étaient maintenant plus nombreux que pouvaient équiper et absorber les unités coréennes existantes. Les soldats sud-coréens servaient déjà dans les formations américaines.
En mars 1953, les premiers (Katcoms) furent intégrés dans les bataillons canadiens. Rémunérés par le gouvernement coréen, ils étaient équipés, habillés et armés par les unités qui les acceptaient. Bien que des difficultés aient surgi en raison des différences de langues, de façons de voir les choses, et de coutumes ainsi que des problèmes de solde, l'expérience connut un assez bon succès et permit l'apport d'une main-d'oeuvre valable.
A découvrir aussi
- LE CANADA ET LA GUERRE DE CORÉE 4 partie
- LE CANADA ET LA GUERRE DE CORÉE 2 partie
- LE CANADA ET LA GUERRE DE CORÉE 1 partie